Avertissement : les informations suivantes sont destinées aux professionnels de la santé. Elles contiennent des termes techniques et médicaux spécifiques.

Porphyrie : transmission et génétique moléculaire

Toutes les porphyries, exceptée la PCT, sont transmises suivant le modèle mendelien. Le déficit enzymatique (environs 50% de la normale) est présent chez tous les patients qui ont hérité du gène responsable d’une porphyrie autosomique dominante (PAI, CH, PV, PPE) mais la pénétrance est faible (environ 10% dans les familles, 2% d’après les études dans la population générale). Les variants rares homozygotes de chacune de ces porphyries ont été décrits. L’activité enzymatique dans les porphyries autosomiques récessive (PDA, PEC) est habituellement inférieure à 20% de la normale.

Les gènes de toutes les porphyries ont été caractérisés et un grand nombre de mutations spécifiques de chaque maladie identifié. Des listes mises à jour régulièrement de ces mutations sont disponibles dans l’Human Gene Mutation Database : HGMD. Toutes les porphyries présentent une grande hétérogénicité allélique.

Transmission des porphyries et génétique moléculaire
Porphyries Transmission n° OMIM gène chromosome Taille du gène (kb) Nombre d’exons Expression
PDA RA 125270 ALAD 9q34 13 13 ubiquitaire et ARNms érythroïde spécifique
PAI DA 176000 HMBS 11q24.1-24.2 10 15 ubiquitaire et isoenzymes érythroïde spécifique
PEC RA 263700 UROS 10q25.2-26.3 34 10 ubiquitaire et érythroïde spécifique
PCT complexe 176090, 176100 UROD 1p34 3 10 ubiquitaire
CH DA 121300 CPO 3q12 14 7 ubquitaire
PV DA 600923 PPOX 1q21-23 5 13 ubiquitaire
PPE DA 17700 FECH 18q21.3 45 11 ubiquitaire
PPEDLX D 300752 ALAS2 Xp11.21 22,4 11 érythroïde spécifique

RA : Récessive autosomique; DA : Dominante autosomique; D : dominante
PDA : porphyrie déficiente en aminolevulinate déshydrase; PAI : porphyrie aigüe intermittente; PEC : porphyrie érythropoïétique congénitale; PCT : porphyrie cutanée tardive; CH : coproporphyrie héréditaire; PV : porphyrie variégata; PPE : protoporphyrie érythropoïétique; PPEDLX : protoporphyrie érythropoïétique dominante liée au chromosome X.

Porphyries aigües autosomiques dominantes

    • L’enquête familiale pour identifier les membres atteints est indispensable pour la gestion de ces porphyries. Les tests sont possibles à n’importe quelle âge, dès la naissance (à partir du cordon ombilical par exemple).
    • Le consentement éclairé des membres adultes des familles est nécessaire pour toute étude familiale. L’identification pendant l’enfance étant possible, les tests des enfants sur demande parentale est éthiquement acceptable.
    • Afin d’assurer une collecte d’échantillons et un suivi appropriés, il peut être possible d’effectuer l’enquête familiale en collaboration avec le CFP.

  • Des précisions à propos des prélèvements nécessaires peuvent être obtenues en nous contactant avant de commencer l’enquête. Pour l’analyse de l’ADN génomique, un volume de sang (5-10 ml) dans un tube EDTA (anticoagulant) est préférable à l’ADN pré-extrait. Des analyses complémentaires (porphyrines plasmatiques, activité de la PBGD par exemple) peuvent être alors possibles.

Méthodes

    • L’analyse de l’ADN pour l’identification de la mutation causale dans le gène approprié est la méthode utilisée. Elle nécessite une identification préalable de la mutation chez un membre de la famille touchée.
      Cependant, les mutations ne peuvent être identifiées dans environs 5% des familles. Un membre atteint sans équivoque peut ne pas être disponible pour l’analyse de la mutation.
    • Les mesures d’activité enzymatique ne sont pas aussi spécifiques ou sensibles que l’analyse de l’ADN. Les tests de la PBGD érythrocytaire est encore utilisé pour la détection de porteur de la PAI quand la mutation ne peut pas être détectée ou que l’analyse de l’ADN n’est pas possible. Le dosage des protoporphyrinogène et coproporphyrinogène oxydases est complexe et nécessite des cellules nuclées.
      L’utilité de la PBGD érythrocytaire est limitée d’une part, par le chevauchement des écarts entre les valeurs normales et celles retrouvées dans la PAI, dépendant de l’âge des érythrocytes (pas fiable avant l’âge d’un an ou chez des personnes ayant des problèmes hématologiques) et, d’autre part, par l’impossiblité d’identifier des formes erythro-spécifiques de la PAI (environ 3-5% des familles).
    • L’analyse des métabolites est intéressante pour un criblage initial des adultes et suffisamment spécifique pour définir un diagnostic sans équivoque, à condition que la méthode appropriée soit utilisée (voir Diagnostics). Il existe des mesures quantitatives du PBG urinaire pour la PAI, des mesures spectroscopiques des émissions de fluorescence plasmatique (EFP) pour la PV et la mesure des ratio des isomères de la coproporphyrine fécal pour la CH.
      Les dosages des métabolites sont cependant normaux avant la puberté et insensibles après cet âge. La sensibilité de la EFP pour la PV est d’environs 60% au dessus de 15 ans tandis que la plupart des adultes avec une PAI latente ont des excrétions urinaires de PBG normales.

    • Le suivi des gènes par l’utilisation des polymorphismes intragéniques peut être utile chez les familles où la mutation ne peut pas être identifiée. Mais cela nécessite un diagnostic sans équivoque par des méthodes autres que l’analyse de l’ADN, d’au moins deux membres de la famille concernée.

Stratégie pour la détection des porphyries aigües latentes

La détection des porphyries aigües latentes se base sur les méthodes de diagnostic. Le tableau ci-dessous récapitule la démarche suivie :

Criblage des porphyries aigües latentes
Type de porphyrie Métabolites visés Enzyme ADN
PAI PBG urinaire : normal avant la puberté.
faible sensibilité chez les adultes
PBGD érythrocytaire : chevauchement de 10-20 % avec les limites de la normale.
L’hématologie doit être normale avec la variante de la PAI (2-5 %)
Gène HMBS : hétérogénicité allélique; requiert l’identificatin préalable de la mutation responsable dans la famille; précis, sensible à plus de 95 %
PV Pic d’émission de fluorescence des porphyrines plasmatiques à 624-626 nm : normal avant la puberté; au delà de 15 ans, sensible à 60% et spéciicité à 100%.
Analyse des porphyrines fécales : normal avant la puberté; au delà de 15 ans, sensible à 36 %
PROTOgène oxydase : dosage complexe, requiert des cellules nucléées Gène PPOX : comme ci-dessus
CH Ratio des isomères III/I de coproporphyrines fécales : très grande sensibilité chez les adultes; non établi chez les enfants COPROgène III oxydase : dosage complexe, requiert des cellules nucléées Gène CPO : comme ci-dessus